AMADOU HAMPÂTÉ BÂ : LE GARDIEN DE LA MÉMOIRE AFRICAINE
Un homme q’on est pas prêt d’oublier : Amadou Hampâté Bâ. Il est l’un des auteurs africains les plus cités avec sa phrase emblématique : « En Afrique, quand un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle« . Une université privée le consacre à Dakar au Sénégal et pleine d’autres institution de plusieurs pays d’Afrique et du monde. l’homme, l’icône; un parcours et un destin ! (En bas de page, le livre à télécharger)
Il a vu le jour en 1901 au Mali en Bandiagara et il est mort à 90 ans en 1991, juste à l’arrivée du multipartisme en Afrique; un fervent défenseur de la pensée noir aujourd’hui 25 ans qu’il nous a physiquement quitté mais à jamais dans chaque lettre de l’Afrique. Disciple de Tierno Bokar, il a consacré sa vie à sauver de l’oubli les trésors de la tradition orale du monde peul et de l’Afrique en Général. Il a une œuvre écrite est considérable ; d’importantes responsabilités lui ont été confiées de son vivant dans l’administration, dans la diplomatie de son pays et à l’UNESCO. Il est pour l’Afrique noire le gardien de la mémoire, de la tradition orale qu’il a bien souvent couché sur papier et est devenu, de ce fait, le défenseur vigilant d’une civilisation si longtemps méconnue.
Né au début du siècle passé à Bandiagara, au pied des falaises du pays Dogon, mort en 1991 à Abidjan, Amadou Hampâté Bâ, est fils de Hampâté Bâ et de Kadidja Pâté Poullo Diallo, il est un descendant d’une famille peule noble. Il véhicule l’afrique à travers des armes qui dépassent le temps, il utilise l’histoire, les œuvres écrites, les contes, la poésie, … Il réputé en France pour la lutte qu’il mena à l’UNESCO, de 1962 à 1970, en faveur de la réhabilitation des traditions orales africaines en tant que source authentique de connaissances et partie intégrante du patrimoine culturel de l’humanité.
Peu avant la mort de son père, il sera adopté par le second époux de sa mère, Tidjani Amadou Ali Thiam, de l’ethnie tout couleur. Il fréquente d’abord l’école coranique de Tierno Bokar, un dignitaire de la confrérie tidjaniya, avant d’être réquisitionné d’office pour l’école française à Bandiagara puis à Djenné. En 1915, il se sauve pour rejoindre sa mère à Kati où il reprendra ses études. En 1921, il refuse d’entrer à l’École normale de Gorée. À titre de punition, le gouverneur l’affecte à Ouagadougou, en qualité d’« écrivain temporaire à titre essentiellement précaire et révocable ». De 1922 à 1932, il occupe plusieurs postes dans l’administration coloniale en Haute-Volta (actuel Burkina Faso) puis jusqu’en 1942 à Bamako. En 1933, il obtient un congé de six mois qu’il passe auprès de Tierno Bokar, son maître spirituel.
En 1942, il est affecté à l’Institut français d’Afrique noire (IFAN) de Dakar grâce à la bienveillance de son directeur, le professeur Théodore Monod. Il y effectue des enquêtes ethnologiques et recueille les traditions orales. Il se consacrera notamment à une recherche de quinze ans qui le mènera à rédiger l’Empire peul du Macina. En 1951, il obtient une bourse de l’UNESCO lui permettant de se rendre à Paris et de rencontrer les milieux africanistes, notamment Marcel Griaule. En 1960, à l’indépendance du Mali, il fonde l’Institut des sciences humaines à Bamako et représente son pays à la Conférence générale de l’UNESCO. En 1962, il est élu membre du Conseil exécutif de l’UNESCO.
Lors de la onzième conférence générale de l’Unesco Amadou Hampâté Bâ prononce un discours le 1er décembre 1960 où il demande « que la sauvegarde des traditions orales soit considérée comme une opération de nécessité urgente au même titre que la sauvegarde des monuments de Nubie ». Il a cette métaphore :
« Pour moi, je considère la mort de chacun de ces traditionalistes comme l’incendie d’un fond culturel non exploité ».
En 1962, au Conseil exécutif de l’Unesco où il a été récemment élu, il répond au sénateur américain Benson qui traite les africains d’ingrats, analphabètes et ignorants :
« Je concède que nous sommes des analphabètes, mais je ne vous concède pas que nous soyons des ignorants.[…] Apprenez que dans mon pays, chaque fois qu’un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui a brûlé ».
Dans la pure tradition orale, la formule est abondamment reprise et déclinée en de multiples variantes, telles que « Chaque fois qu’un vieillard meurt, c’est toute une bibliothèque qui brûle ». L’auteur fait lui-même une mise au point lors du Festival mondial des arts nègres de Dakar en 1966 et reformule ainsi sa pensée : « En Afrique, chaque fois qu’un vieillard traditionaliste meurt, c’est une bibliothèque inexploitée qui brûle ». En 1966, il participe à l’élaboration d’un système unifié pour la transcription des langues africaines. En 1970, son mandat à l’UNESCO prend fin.
Sa déclaration – « véritable fleur de l’oralité » – a pris le rang de proverbe africain et Hampâté Bâ incarne désormais le « vieillard-bibliothèque »
Amadou Hampâté Bâ se consacre alors entièrement à son travail de recherche et d’écriture. Les dernières années de sa vie, il les passera à Abidjan en Côte d’Ivoire à classer ses archives accumulées durant sa vie sur les traditions orales d’Afrique de l’Ouest ainsi qu’à la rédaction de ses mémoires, Amkoullel l’enfant peul et Oui mon commandant !, qui seront publiés en France en 1991. Il meurt à Abidjan en mai 1991. La publication, la révision et la conservation de ses écrits ont reçu l’aide de Hélène Heckmann, devenue sa femme en 1969.
Ce n’est pas pour « conserver des idées dans une bibliothèque » que j’écris, mais au contraire pour assurer la plus large diffusion possible de nos valeurs traditionnelles, afin que chacun puisse s’y référer, méditer et, peut-être, ajouter et créer. En me livrant à ce travail de récolte et de fixation par l’écriture, mon but a été également de servir d’exemple, afin que d’autres continuent dans la même voie. Je ne fais que jouer le rôle du devancier, dont le symbolisme se retrouve dans les danses sacrées le vieux se met en avant, il danse, et tout le monde le suit au rythme de son pas.
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